La Balance, nous dit-on, est le signe dans lequel apparaît la première vision réelle du Sentier – un sentier qui passe entre les paires d'opposés. Ce sentier est si ténu qu'on l'a appelé "le fil du rasoir", un terme approprié qui implique à la fois l'exactitude requise pour maintenir l'équilibre et le danger de perdre l'équilibre. Dans le monde d'aujourd'hui, ce défi est plus exigeant que jamais, car nous vivons à une époque où les extrêmes opposés se définissent avec acuité et où l'impulsion dominante est de choisir un camp plutôt qu'un autre. La puissance de l'esprit analytique mobilise toutes ses ressources pour justifier ses choix, et les résultats de cette démarche sont de plus en plus visibles dans la polarisation croissante que nous observons dans la société, révélant des clivages qui semblent pratiquement impossibles à combler.
La leçon de la Balance est donc plus que jamais d'actualité : comme les êtres humains doivent déterminer leur propre destin et exercer leur libre arbitre en établissant le type de monde dans lequel ils choisissent de vivre, ils doivent apprendre à utiliser les ressources de l'esprit à un niveau bien plus élevé pour que le monde soit pacifique et humain. La note d'orientation de la Balance donne la direction à suivre : Je choisis la voie qui mène entre les deux grandes lignes de force. En Balance, l'équilibre des paires d'opposés se fait par l'activité de l'esprit critique et l'établissement d'un point d'équilibre, nous disent les écrits d'Alice Bailey. Un ancien symbole de la justice est la balance, qui rend le jugement par la fonction de pivot entre deux bras de longueur égale. C'est ici, "au centre de la balance ou au moyeu de la roue, que la perspective réelle et l'action indiquée peuvent être vues correctement", a écrit Alice Bailey.
C'est peut-être cette compréhension qui est à la base du concept taoïste de Wu Wei. On traduit parfois cela par "ne rien faire" mais en fait c'est un mode d'action qui émane du pivot, de l'essence, du Tao (parfois orthographié Dao) ou de la Voie. Huston Smith, dans sa discussion sur le taoïsme dans The World's Religions, a souligné que "nous devons nous rappeler que nous avons peu d'idée de ce qu'est l'énergie. L'action dans le mode du Wu Wei est une action dans laquelle la friction est réduite au minimum". Au lieu de la domination ou de la retenue, la méthode taoïste consiste à rechercher l'harmonie avec la nature – avec le flux naturel des événements – grâce à la faculté d'adaptation ou à l'intelligence active. C'est très différent de l'acceptation passive de "quoi qu'il arrive", mais cela exige de maintenir l'équilibre face au changement, ainsi qu'une écoute silencieuse.
Les intermèdes de silence et d'activité caractérisent toute la vie, du flux de la vie quotidienne aux intermèdes lunaires et solaires mensuels, aux intermèdes annuels et au-delà. La pratique de la méditation fonctionne avec les interludes pour distribuer l'énergie spirituelle en développant la capacité d'entendre "la voix du silence", l'intuition ou la voix intérieure de l'âme. Cela est particulièrement pertinent dans le tumulte actuel, où le besoin d'équilibre et de silence est plus grand que jamais. Au lieu de réagir au tumulte du monde, le serviteur doit apprendre "à s'arrêter sur le plan astral, et là, dans un silence saint et contrôlé, attendre, avant de laisser la force se déverser", selon les termes d'Alice Bailey. "Ce point de silence est l'un des mystères de l'épanouissement spirituel".
Un tel équilibre spirituel permet à l'esprit d'atteindre la clarté du plan mental supérieur où le bien commun, le bien de l'ensemble, prévaut. Toutes les idées vraies émergent de ce point de pivot, éclairant les choix et les jugements à venir. Nous pouvons tous contribuer à cette puissante forme de service à un monde en pleine mutation et transition.