PENSÉES SUR LA BALANCE – Le chemin transcendant

La Balance représente une pause à la moitié du cercle zodiacal, un moment de recueillement, d'équilibre avant d'entrer dans la bataille du guerrier en Scorpion, la concentration lucide sur le but de l'archer en Sagittaire, l'ascension vers le sommet de la montagne en Capricorne, le service mondial en Verseau, et enfin, le sauvetage par le Sauveur du monde en Poissons. "Avant la création, avant de passer à l'action, le silence et l'immobilité d'un point focalisé s'appliquent à la fois au Bélier, le point d'entrée du zodiaque, et à son opposé polaire, la Balance. Ainsi, de manière tout à fait appropriée, la Balance est un signe d'équilibre, de pesée minutieuse des valeurs, et de réalisation d'un juste équilibre entre les paires d'opposés, écrit Alice Bailey. Dans la vie humaine, ces qualités sont importantes pour maintenir des relations harmonieuses.  De nombreuses divergences d'opinion et de points de vue – peut-être même la plupart – peuvent être résolues dans un esprit de compromis et d'accommodement. Cependant, comme le montrent les clivages tectoniques qui se sont ouverts dans le monde d'aujourd'hui, menaçant les relations à tous les niveaux et ayant de profondes implications morales et spirituelles, l'équilibre semble insaisissable et la clarté morale un attribut rare. Une fausse équivalence appelée "le double côté" (anglais bothsidesism) semble trop souvent interrompre prématurément la recherche d'une solution en semblant accorder la même crédibilité aux différents points de vue tout en ignorant les preuves factuelles. Appliquer cette approche erronée aux énergies de la Balance et à sa note clé – Je choisis la voie qui mène entre les deux grandes lignes de force – serait une mauvaise compréhension de ses profondes implications spirituelles pour le chercheur de la Voie.

En Balance, la vision du chemin spirituel étroit et tranchant émerge pour la première fois, provoquant un choc de reconnaissance lorsque la précision ardue requise pour aller de l'avant commence à poindre dans la conscience du chercheur. Les pouvoirs de l'esprit développé, tels que l’absence de passion, le discernement et le détachement, sont nécessaires pour aller de l'avant. C'est cette période de lutte spirituelle qui est décrite dans l'angoisse d'Arjuna dans la Bhagavad Gita.  Confronté à une guerre acharnée entre des factions au sein de sa propre famille, et voyant la souffrance de tous les côtés du conflit, il se sent accablé et ne voit aucun moyen d'éviter la nécessité d'agir. Arjuna est l'éternel artisan de la paix, pris entre deux feux et redoutant de devoir faire un choix.  Son dilemme nous permet de comprendre pourquoi l'image de l'artisan de paix n'est qu'un mirage. Krishna, le guide spirituel d'Arjuna dans le conflit, fait plutôt appel à l'instinct guerrier, au courage élevé et à la valeur de l'âme. Cherchant à invoquer le courage d'Arjuna, le théosophe et spécialiste du sanskrit Charles Johnston a écrit que Krishna déclare : "Rien n'est meilleur pour un guerrier qu'une juste bataille. Faisant la part de la bonne et de la mauvaise fortune, du gain et de la perte, de la victoire et de la défaite, ceins-toi pour le combat ! Tu as droit au travail, mais jamais à ses fruits. En union avec l'âme, accomplis ton travail, sans attachement, égal dans le succès et l'échec, car l'égalité est l'union avec l'âme."

Cependant, cela ne fait qu'embrouiller Arjuna, car si la vision de l'âme est l'objectif principal, pourquoi s'engager dans la bataille ? Pourquoi faire un choix ? Krishna répond que le retrait de la bataille n'y met pas fin, car l'esprit et le désir restent actifs. "Ce ne sont pas le travail et la guerre qui nous lient, mais le pouvoir mystérieux du désir, qui attirerait toutes choses à lui. C'est ce qui lie le cœur et l'âme", écrit Johnston. Seule la détermination et le détachement peuvent servir à clarifier la voie entre les paires d'opposés en ouvrant le canal de l'intuition – le royaume de la raison pure, de la connaissance directe – non pas par l'analyse mais par la révélation instantanée du réel. C'est la troisième voie qui offre un chemin de transcendance au-dessus de la division créée par les paires d'opposés, conduisant à la libération du mirage du conflit.

Les écrits d'Alice Bailey disent que le problème d'Arjuna est le problème de tous les disciples, parce qu'il exige le développement de l'intuition, qui est encore plus élevée que le mental bien informé. À travers la séquence de l’absence de passion, de la discrimination et finalement du détachement, en abandonnant tout espoir de gain personnel et en perçant entre les paires d'opposés, une voie supérieure révèle la synthèse totale derrière la diversité extérieure du monde. Telle est la signification de la révélation soudaine de Krishna à Arjuna sur l'unicité de Dieu, omniprésente et dévorante. Selon Alice Bailey, "Arjuna voit soudain la forme de Dieu dans laquelle toutes les formes constituent la Forme Unique. La bataille est alors terminée. L'âme est en plein contrôle ; aucun sentiment de séparativité n'est plus possible", écrit-elle. Dans cette unité essentielle de l'Un, toutes les différences sont résolues. C'est la voie transcendante à laquelle conduit la Balance.